"L'AMOUREUX DE LA MORT/REGARD LITTERAIRE ET FILMIQUE" !!!!
Gabrielle Wittkop s'était définie comme une joyeuse pessimiste. Femme résolument indépendante, sadienne, elle cultivait le goût pour les "choses" macabres, bien au-delà de l'ordre morale.
Née en 1920 à Nantes, elle se passionne, depuis toute jeune, pour l'étrangeté sombre mêlant le sexe, la mort, l'identité du genre etc.. Elle rencontre sous l'occupation nazie, un jeune déserteur allemand qui deviendra son mari, union qu'elle qualifiera "d'Alliance intellectuelle", affichant - à plusieurs reprises - sa propre homosexualité. Soutenue par son époux, elle s'attache non seulement à des oeuvres littéraires françaises mais aussi allemandes, collaborant pour divers journaux. Elle écrira une dizaines de livres "noirs" dont "Le Nécrophile", parut en 1972.
Son mari, étant atteint d'un mal incurable, elle l'incite à se donner la morte, et fera de même, en se suicidant, à l'âge de 82 ans, le 22 décembre 2002. Celle qui affectionnait les écrits vénéneux, restera une anti-conformiste dans l'âme, quelque peu misogyne, voulant se détacher de la norme, et cultivant une désespérance noire velours "malicieuse". Lors d'une interview : A la question " Vous tenez le genre humain néfaste ?" Elle déclarera JE LA CITE " Je crois que le meurtre est profondément ancré chez l'être vivant quand il n'est pas perverti par le judéo-christianisme. La plus forte sensation de ma vie a été celle d'un rêve. J'étais en train d'assassiner une femme. Elle était sur le sol et j'avais un genou sur sa poitrine. Avec un tesson de verre, je lui tranchais la gorge. J'ai ressenti une sensation de plénitude, c'était le ciel. Ensuite, j'ai rencontré cette femme dans la rue, et j'ai détourné le regard en pensant : Excusez-moi si je vous ai fait mal. Affaire de politesse."
Celle qui n'avait aucune mauvaise conscience pour le genre humain conclura JE LA CITE "Ce que je retire à l'humanité, je le donne aux animaux. Bien sûr, j'ai des grandes amitiés. Ma vie a été turbulente, j'ai été bisexuelle. Si je n'ai pas toujours été une honnête femme, j'en ai été, en revanche, un honnête homme." !!!! (Wiki, évène, extraits le Matricule des Anges)
"J'ai voulu mourir comme j'ai vécu : en homme libre."
La définition même de la nécrophilie désigne une attirance sexuelle pour les cadavres. Cette pulsion reste floue depuis l'époque de l'Egypte antique avec Hérotode - ce dernier coucha durant 7 ans avec sa femme Marianne, après qu'il l'eut lui-même assassinée - mais n'en demeure pas moins une réalité, un besoin pervers "pratiqué".
Bien que "Le nécrophile" de Gabrielle Wittkop délivre peu de pages (95), ce n'est pas "chose" aisée de s'immerger dans le journal intime d'un antiquaire, Lucien N. amateur de Netsuke japonais (statuettes burlesques mettant en scène de vigoureux ébats avec des morts), collectionneur "macabre" distillant son récit secret de ses amours nécrophiles. Jeunes, vieux, homme, femmes, enfants, chaque trépassé(e) devenant l'objet de son affection, et de sa minutieuse ferveur érotique.
Notre rapport à la mort reste une symbolique forte du fait de notre société à ne pas (plus) vouloir en parler, dissimuler, sacraliser le corps "dépossédé" de vie. De ce voleur/violeur de dépouilles, trouvant sa jouissance au "coeur" du sexe glacé, s'est instauré - entre lui et moi - une étrange relation fascination/dégoût dont le verbe sensuellement froid de Gabrielle Wittkop cristallise, sonde les désordres d'un homme solitaire dans l'impossibilité d'aimer une âme vivante. Oserai-je dire que ce taphophile m'a séduite ? Oui, puisqu'au delà des descriptions "odorantes" morbides, la plume explicite de Wittkop se libère de toute vulgarité, de toute complaisance, jugement ou plaisir malsain, épousant un style phtisique à l'image de cette entrevue indescriptible avec un bébé mort-né dans les bras de sa mère. L'amour revêt des milliers de formes, et de ses actes innommables, Lucien N. se veut sincère, pur, délicat, brûlant pour ses précieuses enveloppes. Il les emmène dans son appartement, les aime, se nourrit en eux, par eux. Instant éphémère, il ne peut en être autrement, la chair bleutée se "fane" : odeurs nauséabondes, putréfaction où la magnificence du désir interdit demeure dans la finalité du néant. Alors vient le temps des pleurs d'un personnage de littérature parfois sublime, submergé par ses émotions, cette passion qui le dévore, et "tombant dans la mort comme Narcisse dans son image".
Oeuvre littéraire somptueusement "noire", Gabrielle Wittkop bouleverse, interpelle son lecteur(ice). La mort fait peur, inquiète, pourtant dès notre naissance nous la devinons, la humons, et l'écrivaine nous le rappelle pour mieux la coucher tout en prestesse sur le papier. Poésie "clinique" voire sauvage d'où s'émane un charme indéfinissable aux effluves transgressives, "Le nécrophile" évoque une expression/réflexion sur l'amour et la mort, les tourments/déviances gothiques d'une Aberration morale/mentale puis convoque l'audace décomplexée d'une auteure voulant faire remonter à la surface ce qu'une sacro-sainte humanité tente de nous dissimuler, il faut juste savoir doser son propre ressenti pour en apprécier sa lecture. Se confondant entre obscène et pudeur, malsain et naturel, le plus perturbant - au final - est de ne PLUS être choqué(e) au fil des pages : IL y a de la beauté à cet effroyable amour !!!!
" "La mort et l'amour, cruelles et romantiques inspiratrices des poètes, à la fois muses et fantasmes, peuvent conduire à l'amour de la mort."
EXTRAITS
"Je ne passe guère de jour sans évoquer Suzanne, ses seins aux larges auréoles beiges, son ventre creux, suspendu, comme une tente entre les deux pointes des hanches, son sexe dont le seul souvenir suffit à émouvoir le mien. Aujourd'hui, l'ivoire de ses os, à quels coquillages marins intégré ? "
"Hérotode nous enseigne que les femmes de qualité - après leur mort, ne sont pas livrées sur le champ aux embaumeurs, pas plus que les femmes très belles et d'une grande renommée. On ne leur confie qu'au bout de trois ou quatre jours. On veut éviter par-là que les embaumeurs n'abusent de ces femmes -. Le plus ancien des commentaires épars dans la chronique humaine sur cette inoffensive passion que d'aucuns nomment perversité. Mais les - Trois ou quatre jours - sont d'une naïveté.."
" On parle du sexe sous toutes ses formes, sauf une. La nécrophilie n'est ni tolérée des gouvernements ni approuvée des jeunesses contestataires. Amour nécrophilique, le seul qui soit pur, puisque même amor intellectualis, cette grande rose blanche, attend d'être payé de retour. Pas de contrepartie pour le nécrophile amoureux, le don qu'il fait de lui-même n'éveille aucun élan."
La nécrophilie reste un thème/tabou peu abordé en littérature, il en va de même pour le 7ème Art. En 1987, un réalisateur allemand Jörg Buttegereit délivre un film d'épouvante narrant l'histoire d'un couple amoureux de la mort, s'adonnant aux jeux sexuels morbides.
Difficile de décrire cette étrangeté filmique où le Lucien N. de Gabrielle Wittkop ne n'y retrouverait pas. "Nékromantik" est une oeuvre filmique sans concession, le glauque rencontrant le romantisme macabre et la folie extrême. Portée par une imagerie "sale" malsaine, l'oeuvre met en exergue les fantasmes nécrophiles "funèbres", atteignant leurs paroxysmes dans un final où amour, sexe et mort ne font plus qu'un ! Honnêtement, je ne sais toujours pas si je dois recommander cet O.V.N.I éprouvant. Amateurs de sensations très très fortes, à vous de voir !!!!.
40x60 (i dont know) Pintura al Temple VENDIDA / SOLD Necrophilia
http://cursed--soul.deviantart.com/art/Necrophilia-166940397
"Je suis une joyeuse pessimiste. Je pense à ma mort tous les jours et ça ne m'attriste pas du tout. Je n'ai personne à ménager. On dit que le monde va de mal en pis. Moi je dis bye bye. Je ris beaucoup."