"Un enfant de Dieu" !!!
Cormac McCarthy, au travers d'un phrasé douloureux, ( voir mon article sur l'écrivain ) tisse, une nouvelle fois, une oeuvre sombre, au goût de "rouille", éblouie par l'effroyable condition d'un homme : Lester Ballard, un enfant de Dieu !
Un jour, un gamin se retrouve seul, face au monde. Il grandit, survit, erre dans les montagnes, observe, chasse, tue, viole. Il devient ce que la "ville" a fait de lui : un paria. Cet être de chair et de sang développe une logique, un comportement propre à lui-même. Petit à petit, Ballard dépasse sa condition et les limites prescritent par notre société. Le bien et le mal - essences de nos agissements envers autrui - deviennent pour lui une équation, depuis nombre d'années, oubliée, refoulée. L'écrivain américain dépeint une "bête" infâme, à l'allure crasseuse, maigrichonne, symptôme d'une somme d'évènements, d'une population violente animée par le sang, la traque, la violence. Le lecteur malmené par des mots, des phrases à la symphonie morbide, tente de comprendre. Il cherche une raison, un "quelque-chose" à quoi se rattacher, un indice pour ne pas sombrer - avec Ballard - dans un monologue sanglant où les pleurs, l'angoisse, le désir, les jurons, la haine s'entremêlent, s'embriquent pour créer une "chose", un "rebus". Il n'en sera rien : LESTER BALLARD est et restera LESTER BALLARD.
Froid, intriguant, licencieux, parfois absurde, Cormac McCarthy dépeint le portrait radical d'un monstre : Pourquoi ? Comment ? Quand ? Un cheminement éprouvant pour arriver à la "vérité crue" que représente Ballard : un sociopathe, un charognard, UN ENFANT DE DIEU !!!
____________________________________________________________________
EXTRAITS " UN ENFANT DE DIEU"
" Il est petit, crasseux, mal rasé, une brutalité contenue. Un enfant de Dieu, sans doute comme vous et moi".
" Il restait là à genoux à regarder les deux corps. Ces salauds-là, y sont sacrément clamsés, dit-il (...) Ballard lui repoussa les jambes d'un coup de pied et ramassa sur le sol la culotte de la fille, la huma et la mit dans sa poche. Il regarda par la lunette arrière et écouta. Agenouillé là, entre les jambes de la fille, il défit la boucle de sa ceinture et baissa le pantalon".
"Il regardait la minuscule progression de toutes ces choses dans la vallée, les champs gris qui noircissaient et se cordaient sous la charrue, la lente occlusion verte que propageaient les arbres. Assis là, sur ses talons, il laissa tomber sa tête entre les genoux et se mit à pleurer".
______________________________________________________________