"LARS VON TRIER/L'EXPRESSIONNISTE DU 7EME ART" !!!!
Poussé - dans son enfance - par une mère amoureuse des Arts - en particulier le piano et la peinture - les exécutions de Lars Von Trier se définissent telles des oeuvres picturales au travers de différents chapitres. Voulant se différencier du COMMUN des importants directeurs, le réalisateur Danois génère autant de l'admiration que de la détestation mais faute de reconnaître qu'il est certainement l'un des seuls cinéastes contemporains a OSE et remettre en question un cinéma formaté et plus que consensuel.
Né (en 1956) à Copenhague au coeur d'une famille bourgeoise - des fonctionnaires communistes - le petit Lars est très vite livré à lui-même : sa mère Inger, fascinée par le milieu des artistes et grande adapte de l'éducation libre, inculque à son fils sa soif de liberté, de véracité, de sincérité mais trahit sa confiance - sa mère lui avouera, peu avant son décès, avoir eu un enfant d'une relation adultère (voulant mettre au monde un être "unique" avec un homme porteur de gènes artistiques) - ! A l'âge de 10 ans, le petit Lars se transforme en un enfant libre de tous ses actes, ne supportant quelconque autorité et souffrant d'absence de repères solides et rassurants. Son expérience scolaire s'avère douloureuse : le monde extérieur l'effraie ! Ne trouvant aucun intérêt aux études, en proie à de fortes migraines (sans oublier une claustrophobie toujours plus grandissante), le jeune garçon - sous les étranges encouragements de ses parents JE LES CITE "Ne te laisse pas faire, lève-toi et pars." - termine péniblement (sous la surveillance d'un percepteur) sa scolarité. Pendant 3 ans, l'adolescent - sous l'oeil complice (en total accord) de sa mère Inger - passera ses journées à peindre, boire de l'alcool (des verres de vin blanc) et traîner. S'en suivra des cours par télé-enseignements où il finira par obtenir son bac. Pendant cette période trouble, Lars - juif de par son père - s'intéresse à la religion, essayant à tout prix se faire sa propre place dans la société. Il n'en deviendra pas pour autant un pratiquant assidu et s'éloignera de la théosophie à la mort de son paternel, il a 18 ans. Lars Von Trier apprendra (plus tard) que sa famille n'était finalement pas juive et bien allemande, dévoilant un malaise (de plus) quant à sa propre identité.
De ce début de parcours de vie chaotique, il est facile d'assimiler les futurs travaux de Lars Von Trier. En réponse à cette non-éducation, il en ressort des maux que le réalisateur délivrera sur grand écran, créant un univers sombre, complexe empreint d'une vision métaphysique et allégorique (influencée par d'illustres pairs comme Ingmar Bergman, le réalisateur russe Andreï Tarkovski à qui il voue une véritable admiration. Il lui dédiera l'un de ses plus beaux films "Antichrist"). C'est à l'âge de 10/12 ans que le cinéma trouve véritable intérêt au très jeune danois. Coincé dans un système qui l'étouffe - grâce à une caméra familiale super 8 - Lars crée un monde avec ses propres règles : n'aimant pas la vie, celle de son imaginaire devient L'UNIQUE qu'il maîtrise et manipule ! Et ce n'est qu'à la faculté que le jeune homme adhère à une association de cinéastes amateurs, rajoute le Von à son patronyme, prenant exemple sur le grand acteur allemand Erich Von Stroheim - la particule attirera ses futurs professeurs plus intrigués par cette "coquetterie" que pour les films de l'étudiant -. Il rentre (enfin) dans une école de cinéma sur présentation de son premier (véritable) film - tiré d'un roman de Von Trier, jamais publié - "Le jardinier des orchidées", retenu pour son originalité. Von Trier va faire des rencontres primordiales pour son avenir dont Tom Elling (peintre et opérateur), Thomas Gislason (monteur) et Niels Vorsel (scénariste). Ces hommes partent de la technique pour trouver l'inspiration et désirent s'éloigner des théories de l'Ecole du cinéma de Copenhague.
Perfectionniste et exigeant, autant sur le point artistique que technique, Lars Von Trier aspire à un cinéma où JE LE CITE "chacune de ces images contient une pensée". Cette appétence, souvent décriée et incomprise par beaucoup, demeure l'essence même de ce cinéaste hors-norme dont je suis une grande admirative. Rien n'est laissé au hasard dans l'entreprise de Von Trier (bien qu'il se fie à ce dernier, de son propre aveu) et encore moins gratuite. la preuve pour sa dernière exécution "Nymphomaniac" : la meilleure réalisation (pour le blog) d'un Von Trier qui livre une magistrale leçon de cinéma au travers du portrait saisissant de Joe - femme esseulée et troublée - sous addiction d'un mal qui la ronge (que je vais amplement développer dans ma critique). Comme le précisent de nombreux critiques, le travail de Lars Von Trier se divise en plusieurs périodes. A l'image d'un peintre/plasticien, on déambule dans son univers cinématographique, découvrant à chaque coup de pinceau "filmique" ses atypiques dyptiques; s'efforçant de ne pas reproduire à l'infini la même narration, grande préoccupation du cinéaste danois.
Il devient le fondateur d'un dogme DOGME 95 avec le réalisateur danois (Directeur de l'excellent "La Chasse" avec Mads Mikkelsen ou "Festen" tiré de cette théologie, futur visionnage du blog) en réponse à un certain cinéma contemporain à grand budget (visant le cinéma américain). De ce précepte issu de la Nouvelle Vague, des années 60 , du New American Cinéma et de certains réalisateurs comme John Cassavetes, Ken Loach ou Bo Wideberg (cinéaste suédois), Von Trier délivre une contre-proposition, voulant démontrer un autre regard cinématographique. Je n'ai pas encore vu l'une des réalisations de Von Trier "Les Idiots" s'attachant à cette idéologie en 10 règles.
DOGME 95/LE VOEU DE CHASTETE :
" Vœu de chasteté
Je jure de me soumettre aux règles qui suivent telles qu'édictées et approuvées par Dogme 95.
1. Le tournage doit être fait sur place. Les accessoires et décors ne doivent pas être amenés (si on a besoin d'un accessoire particulier pour l'histoire, choisir un endroit où cet accessoire est présent).
2. Le son ne doit jamais être réalisé à part des images, et inversement (aucune musique ne doit être utilisée à moins qu'elle ne soit jouée pendant que la scène est filmée).
3. La caméra doit être portée à la main. Tout mouvement, ou non-mouvement possible avec la main est autorisé. (Le film ne doit pas se dérouler là où la caméra se trouve ; le tournage doit se faire là où le film se déroule).
4. Le film doit être en couleurs. Un éclairage spécial n'est pas acceptable. (S'il n'y a pas assez de lumière, la scène doit être coupée, ou une simple lampe attachée à la caméra).
5. Tout traitement optique ou filtre est interdit.
6. Le film ne doit pas contenir d'action de façon superficielle. (Les meurtres, les armes, etc. ne doivent pas apparaître).
7. Les détournements temporels et géographiques sont interdits. (C'est-à-dire que le film se déroule ici et maintenant).
8. Les films de genres ne sont pas acceptables.
9. Le format de la pellicule doit être le format académique 35mm.
10. Le réalisateur ne doit pas être crédité.
De plus, je jure en tant que réalisateur de m'abstenir de tout goût personnel. Je ne suis plus un artiste. Je jure de m'abstenir de créer une « œuvre », car je vois l'instant comme plus important que la totalité. Mon but suprême est faire sortir la vérité de mes personnages et de mes scènes. Je jure de faire cela par tous les moyens disponibles et au prix de mon bon goût et de toute considération esthétique.
Et ainsi je fais mon Vœu de Chasteté. "
Copenhague, Lundi 13 mars 1995
Au nom du Dogme 95 Lars Von Trier, Thomas Vintenberg. (Wikipédia)
Certains de ces films (comme "Les Idiots" de Von Trier") vont rencontrer le succès. Des cinéastes actuels tentent la délicate aventure de ce Dogme 95 sans en atteindre la popularité souhaitée. Créée et écrite à Copenhague en 1995, le 20 mars 2005, Von Trier et Vinterberg décident et annoncent qu'ils se libèrent de cette idéologie.
Ce qui demeure plus qu'essentiel dans l'entreprise de Von Trier, c'est ce besoin d'authenticité, d'improvisation (maîtrisée), d'ironie, d'humour noir : mélangeant le théâtre, l'opéra, la littérature, la peinture et les citations (multipliant les hommages aux oeuvres importantes du 7ème Art). En 1984 et 1991, deux de ses premières oeuvres cinématographiques "Element Of Crime" et "Europa" remportent le Grand Prix de la technique au festival de Cannes. En vrai plasticien, le cinéaste danois offre une vision novatrice autant envers la bande-sonore et les prises de vues et ose aussi s'aventurer dans le film d'épouvante "L'Hôpital et les fantômes" (nouvelle prise de risque, la caméra portée). De "Breaking The Waves" (ma deuxième découverte filmique du célèbre réalisateur, 1996), "Dancer in the Dark" (2000), "Dogville" (2003) - première trilogie CRITIQUE visant le cinéma américain avec "Manderlay" (2005) et un troisième restait à l'état de projet. Le réalisateur précise aimer faire les trilogies, cela lui permettant de décliner un récit sous différentes formes - "Antichrist" (deuxième triptyque, 2009) avec"Mélancholia" (2011) et "Nymphomaniac"(2013) l'on retrouve les mêmes thématiques cycliques, en réponse à la singulière enfance de Von Trier : La trahison (dont j'ai fait référence plus haut) le cinéaste n'a jamais plus oublié celle de sa mère JE LE CITE :"La trahison d'une femme est en soi plus glauque parce qu'une femme est une mère dans l'inconscient collectif. Et la trahison d'une mère est dramatique dans le sens où c'est à elle que l'on fait le plus confiance. Si on ne peut plus lui faire confiance, c'est une tragédie." Cette défection cause des dégâts collatéraux chez le cinéaste. Le transfert de culpabilité, la modification de personnalité, l'agonie - réinterprétant les symboles biblique et la structure de récits naturalistes - ("Dogville"), le sacrifice ("Dancer in the Dark"), le combat du bien et du mal, la psychologie et la sexualité féminine, le deuil, la douleur, dénonciation des dogmes religieux, ("Antichrist", "Mélancholia" et "Nymphomaniac"), le pouvoir et ses injustices, l'autorité religieuse ("Breaking the Waves"). Toutes ces interprétations sur l'individu - la femme, figure prédominante - et son intimité, sa peur, les événements tragiques d'une vie, l'abnégation fascinent et hantent Lars Von Trier. Il déclarera : " Le sacrifice, c'est une manière de donner sens à mon existence". De ce dévouement, le directeur n'a qu'un seul et véritable désir, faire évoluer le cinéma.
Il me reste encore des oeuvres cinématographiques à découvrir - citées plus haut - "Manderlay" et les toutes premières réalisations mais cet EXPRESSIONISTE du 7ème Art reste à ce jour l'un des piliers du cinéma contemporain : qu'on l'affectionne ou qu'on le déteste, le primordial étant pour le cinéaste danois SE DEMARQUER, quitte choquer (ce qu'il réfute) ou provoquer ceux(celles) dans l'impossibilité "d'embrasser" son génie : Lars Von Trier où un cinéaste en perpétuelle quête !!!!
SOURCES
(Wikipédia - Voir filmographie complète - Arte, Sublime Acide, Evène, Entretiens avec Lars Von Trier - Stig Bjökman - Les Cahiers du Cinéma, Allociné, Le Huffington Post).
"J'ai peur de tout dans la vie sauf de filmer."
FILMOGRAPHIE SELECTIVE
"Nymphomaniac" a été réalisé par Lars Von Trier. Sortie Director's Cut le 6 janvier 2015 (Blu Ray collector).
Par une froide soirée d'hiver, le vieux et charmant Seligman découvre, au détour d'une ruelle, le corps inanimé de Joe. Soucieux de ses blessures, il lui offre l'hospitalité.Joe, qui s'est auto-diagnostiquée nymphomane, raconte à Seligman les étapes d'une vie régie par ses désirs...
Il aura fallu attendre la sortie du director's cut de "Nymphomaniac" pour analyser et apprécier la vision poétique/philosophique de Lars Von Trier sur le (son) psyché et la sexualité féminine. Honteusement tronqué à sa sortie en cinéma, je ne peux que recommander à ceux et celles désirant se plonger (ou replonger) dans le regard filmique du réalisateur danois : visionner - d'une traite - le long-métrage dans sa longueur originelle.
En réalisant "Nymphomaniac" - SON film pornographique comme le désigne Lars Von Trier - le réalisateur danois explore un nouvel genre cinématographique le "digressionnisme" : la digression est une figure de style qui consiste en un changement temporaire de sujet dans le cours d'un récit, en plus clair Lars Von Trier désire s'éloigner du thème principal LA NYMPHOMANIE pour parler - une nouvelle fois - de lui-même et ses propres maux. En explorant les méandres de la sexualité féminine, Lars Von Trier continue son cheminement personnel. Manuel Alberto Claro (son directeur photo depuis Dogville) précise lors d'une interview (Télérama) " Lars disait depuis longtemps vouloir faire un film porno, mais évidemment, dès qu'il nous a parlé plus précisément du film, il était clair que ce n'était pas ça. Il s'est servi de l'idée du porno comme point de départ, une énergie...Lars est quelqu'un de très cultivé, il est fasciné par les grands écrivains comme Proust, Dostoïevski et Mann qu'il cite souvent....en parlant de ses propres addictions, comme il ne veut pas passer par une autobiographie, il prend des détours plus abstraits...Avant le tournage, nous avons travaillé à donner une identité visuelle spécifique, une couleur à chacun des chapitres. Lars voulait que le film rassemble différentes façons de filmer, avec une grande liberté..."
Et, au-delà du thème principal, NYMPHOMANIAC reste une brillante leçon de cinéma d'un cinéaste (comme je l'ai précisé dans sa mini-bio) ambitieux. Je suis très surprise que les dit critiques ont omis de parler d'un genre que Von Trier souhaite fouiller : le digressionnisme comme il le nomme. Il est plus qu'essentiel de connaître - en amont - les désirs d'un directeur SOUCIEUX pour assimiler ses multiples représentations ! Le cinéaste danois soulève une énième fois la controverse en abordant un trouble psychologique la NYMPHOMANIE dont la définition reste assez floue pour un plus grand nombre. Lars Von Trier ne fait jamais rien de gratuit : filmer du sexe pour du sexe, n'est pas son but principal, il suffit juste de connaître un peu mieux l'entreprise, les réflexions du réalisateur pour ne SURTOUT pas s'en tenir à un rapide (stupide) raccourci/conclusion !
ATTENTION SPOIL
Lors du tournage d'Antichrist, Lars Von Trier est victime d'une grave dépression nerveuse - envisageant le pire, ne plus réaliser -. De cet état, ressortira toutes les noirceurs d'une âme (la sienne) et un intérêt évident pour le plaisir et la complexité sexuelle féminine, et ce qui en découle LA (sa) SOUFFRANCE conjuguée en trois temps, Nymphomaniac étant l'ultime épisode de cette affliction. Non sans une pointe d'humour, le cinéaste avouera " Les avions c'est comme les femmes. Je suis fasciné et en même temps terrorisé." (l'une des peurs multiples "phobiques" de Von Trier) !
Cette FEMME/DOULEUR sera à deux reprises interprétée par Charlotte Gainsbourg ("Antichrist" et "Nymphomaniac"). S'inspirant des récits célèbres du Marquis du Sade et d'une expérience personnelle - Von Trier racontera s'être fait dépuceler par une jeune femme française libertine - le cinéaste danois continue son voyage psychanalytique et met en scène Joe - une femme qui s'est auto-diagnostiquée nymphomane - recueilli par Seligman/Stellan Skarsgard, vieil homme asexué transposant son plaisir/jouissance au travers de la culture et des Arts (autre pathologie). Cette dernière va lui raconter sa vie passée et ses déboires liés à ses troubles sexuels. L'échange qui s'établit entre l'héroïne et son interlocuteur permet à Von Trier de convoquer l'étude du corps, son intimité, ses blessures/déviances puis de mettre en exergue le complexe d'Electre - l'équivalent du complexe d'Oedipe suggéré par Jung (médecin psychiatre), rejeté par Freud. Cette période dite "phallique" (regard freudien) Joe/la fillette - privée de pénis - ressent de l'hostilité envers sa mère nourricière/rivale, vouant une admiration/attirance fusionnelle pour son père. Dès lors, nous allons assister à deux regards, deux récits différents : celui de Joe et de son confident Seligman. L'héroïne délivre son MOI le lit/divan où elle raconte son histoire, et le vieil homme/thérapeute l'écoutant et commentant, sur son siège. Après un dépucelage brutal et sans émois, la jeune Joe mutliplie les rapports sexuels où la bagatelle prend une place aussi importante que sa névrose naissante à l'image de la première scène parlante du TRAIN. Lars Von Trier montre son héroïne se dirigeant dans un wagon où une amie l'invite à un jeu pervers. l'objectif est simple : pour obtenir un paquet de sucreries, il faut cumuler le plus de rapports sexuels - La narration de Joe/adulte et les réflexions de Seligman viennent s'ajouter en voix off , de même que leurs premiers jugements. En racontant cet épisode humoristique, Joe révèle à son confident que la scène de sexe est au final l'unique finalité pour obtenir les bonbons. Seligman imaginera et dédouanera la gravité des actes en les comparant à celui d'un pêcheur remontant un cours d'eau pour y trouver et appâter ses proies. Joe, elle, renie ses actes et s'accable. Lars Von Trier multiplie les métaphores où la peinture, la musique classique, la religion, la nature, les citations trouvant écho aux désordres psychologiques du personnage principal. Cette vision (dans le train) ainsi qu'une première image traumatique posent définitivement Seligman/thérapeute et le spectateur au coeur de la déconstruction psychophysiologique de Joe. De la discussion Patiente/thérapeute, Lars von Trier "fusionne" le sexe à la mort : deuxième scène forte où la jeune femme lubrifie face au corps sans vie de son père. La jouissance trouve sa résonance dans le chagrin et la désolation. Cette dernière associée à une maternité non-désirée, ni assumée puis avortée : séquence choc, exagérée (fantasmée ?!?!) pour éprouver, déstabiliser le confident/Thérapeute. L'érotisme/jeu laissent place à la violence! Le plaisir charnel, l'extase amoureuse, les sentiments INEXISTANTS. Le vagin de Joe devient une (son) arme de pouvoir, de séduction : SON arme destructrice mais aussi auto-destructive !
Lars Von Trier appuie là ou ça fait mal, malmène une "hypocrisie" masculine - depuis que l'HOMME EST HOMME - en délivrant le parcours érotique de Joe. La sexualité des femmes, au regard de notre sacro-sainte société , fait toujours controverse : le mâle qui multiplie les conquêtes sexuelles renvoie l'image du séducteur/Don Juan, l'inverse inacceptable ! annihilée par la médecine puis jugée et condamnée, la femme/séductrice est vue telle une mangeuse d'homme, une monomane...une allumeuse, on déverse rapidement dans l'insulte. Pourtant derrière la véritable définition de la nymphomanie se cache une forte carence affective, et l'addiction dont souffre Joe n'a rien d'enviable. De son affliction liée à un désir sexuel effréné et inassouvi malgré la multiplication des rapports, l'héroïne dépasse les frontières de l'extrême et de l'inacceptable. Toutes les déviances sexuelles - du sadomasochisme à la trilogie....pédophilie inavouée : Jean Marc Barr/débiteur percé à jour par Joe/exécutrice - mettent à mal LE spectateur peu enclin à épouser la représentation (juste) de Von Trier !
Réaliste, lucide, féroce, ironique, le réalisateur délivre son Moi/Charlotte Gainsbourg. La rébellion sera SIENNE ! de même pour Joe - résistante inconsciente - face à la dictature de la bien-pensée moralisatrice drapée dans une toute puissante autorité ! Comme précise le chef-opérateur Claro de Von Trier pour Télérama " La nymphomanie, ce n'est pas un commentaire sur les femmes, il parle de lui...Tout le monde sait qu'il est sujet à des crises d'angoisses, ce qui le rapproche d'une personne subissant une addiction : ce sentiment de perdre le contrôle de soi... Il prend toujours ses médicaments...Il est honnête avec ça." A travers Joe, le cinéaste supporte une (sa) vie qui ne trouve que son point d'ancrage dans l'imagerie filmique et artistique. Aux questions : Lars Von Trier est-il une femme, ELLE "objet" de sa fascination ? Il l'est par défaut, une "femme" imparfaite, tout comme l'était sa génitrice. Sa soi-disant misogynie dans tout cela ? Je n'en vois pas mais misanthrope, il l'est sûrement - d'une trahison (renvoie de l'image matriarcale) des attentes "déçues", d'une perte de confiance en l'autre (mensonge sur l'identité familiale) naît un mépris pour le genre humain - Ses oeuvres cinématographiques parlent de la folie humaine et du carcan sociale dans lequel les hommes et les femmes demeurent. En livrant leurs péchés sur un écran noir, il convoque un puritanisme fallacieux et conservateur. Le cinéma du réalisateur danois est la RESULTANTE de cette pudibonderie et ses conséquences.
Lars Von Trier affectionne le 7ème Art, celui qui se RENOUVELLE, OSE, BOUSCULE les codes, amène à la réflexion, manie les genres avec brio, quelque peu provocateur....Et n'oublie pas (pour l'occasion) de régler ses comptes, en regard de la toute dernière scène où Von Trier/Joe déclame un génial FUCK à Seligman/ses détracteurs ! DELECTABLE REPONSE ASSASSINE MONSIEUR VON TRIER (à qui voudra comprendre) et magistrale démonstration cinématographique !!!!
"Je ne fais pas des films pour choquer. Evidemment le pire ce serait que les gens s'en moquent. Un film, c'est sérieux pour moi."
NYMPHOMANIAC BLUR RAY 1 (2h27)/ Entretiens avec Stacy Martin et Shia Labeouf. Entretien avec le réalisateur Jorgen Leth par Philippe Rouyer (critique de cinéma).
NYMPHOMANIAC BLUE RAY 2 (2h58)/ Entretiens avec Charlotte Gainsbourg et Stellan Skarsgard. "Plus c'est long, plus c'est bon", commentaire comparatif (intéressant) les deux versions par Philippe Rouyer.
"Derrière le plaisir, une douleur se construit."