"DE LA SOLITUDE PICTURALE A CELLE DE SUE PERDUE DANS LA CITY NEW YORKAISE" !!!!
La solitude est entrain devenir un des sujets réccurents du nouveau cinéma indépendant, mais dans les années 90, des réalisateurs comme Amos Kolleck, au travers d'une trilogie, avait dressé le portrait d'un délaissement avant tout féminin, débutait en 1997 pour s'achever en 2000. Mais si l'isolation de l'humain en général a fait aussi le bonheur de quelques oeuvres cinématographiques rares, la peinture (tout comme la poésie) l'a exploité, et l'exprime avec simplicité : du 7ème Art au 6ème Art, il n'a qu'un pas et, parfois, les pinceaux impressionnent autant que les mots !
On ne le redira jamais assez, il y a peu le long-métrage "Her" (ICI critique http://christianbalefan.over-blog.com/2014/04/jonze-l-enchanteur.html) avait intelligemment démontré, que l'homme moderne devient chaque jour de plus en plus vulnérable et qu'à l'ère de toutes ses merveilles technologiques où d'un seul clic nous pouvons créer des liens avec des êtres anonymes (voir virtuels) ignorant du même fait un drame ou la souffrance d'un voisin. L'individualisme, l'isolement règnent en maître, créent des freaks où la peur de l'autre les font fuir. L'homme moderne vit au-dessus de lui-même comme une fuite en avant. Il privilégie des principes, des idéaux toujours plus superficiels, consuméristes, narcissiques, égocentriques : un besoin de s'aimer, de s'adorer avant tout , sans vraiment apprendre de son prochain ! à l'image de tweets, instagram qui inondent sans cesse la toile de toutes ces stars décérébrées (nous, adorateurs passifs, idôlatrant faute de ne pas pouvoir vivre leurs vies de chimères) ayant un besoin d'étaler leur bonheur indécent, à l'apparence parfaite; où d'illustres inconnus, eux-mêmes, se pourvoient en quête de leur propre reconnaissance personnelle. Et de ces soi-disant partages, le retranchement de l'être détériore cet infime équilibre psychologique qu'il nous reste, à l'image d'un monde en perte de l'estime de soi, de l'autre, voire pire le respect de la vie. Nous vivons de plus en plus dans un monde artificiel, nous les spectateurs/acteurs - privilégiés ou pas - de cette démoralisation humaine grandissante qui sans un retour aux vraies valeurs humaines signera la fin de notre espèce.
Edward Hooper, David Bacon, Eric Lacombre ou Denise Mangones sont des artistes peintres qui ont souvent mis au coeur de leurs oeuvres picturales cette solitude, cette désespérance qui ne peuvent qu'interpeller et toucher. Voici un petit florilège des plus belles représentations qui m'ont ému avant de plonger dans le touchant parcours d'une Sue, femme égarée dans le Manhattan de Amos Kollek : attention chef-d'oeuvre !!!!
"Il n'est pire solitude que celle qui naît de l'indifférence des autres. Et chacun peut-être victime un jour de l'indifférence et en souffrir. Alors, pourquoi ne pas tendre la main à celui ou celle qui est seul."
"Sue perdue dans Manhattan" a été réalisé par Amos Kollek en 1997. Sortie en salle le 16 septembre 1998.
Les errances d'une jeune femme seule et sans emploi qui vit a New York. Sue a quitte depuis longtemps sa province, sa famille et ses amis pour New York. Elle a perdu son emploi de secretaire et ne peut plus payer son loyer. Attirante et sexy, elle s'en remet au hasard des rencontres inattendues d'un soir pour soulager sa solitude. Armee d'une tenacite surprenante et d'une grande dignite, elle essaie de nouer des relations d'amitie avec des femmes pour alleger son chagrin.
Amos Kollek est un réalisateur que j'ai découvert lors d'un visionnage au cinéma de minuit de France 3 , en début 2000, qui rendait un hommage à l'exécution du cinéaste, au travers de trois portraits de femmes désoeuvrées dont "Sue perdue dans Manhattan", et de cette trilogie naîtra une vraie connection entre le cinéaste israélite et la comédienne américaine Anne Thomson qui, deviendra l'héroine désespérée de ses trois oeuvres cinématographiques jugées pessimistes.
Dans une ville tentaculaire MANHATTAN, Sue erre à la recherche d'un emploi. Avec assurance et assiduité, elle se présente à tous les postes possibles, s'inventant au passage des diplômes factices mais la petite supercherie ne prendra pas longtemps; après quelques petits boulots éphémères, la jeune quarantenaire, ne pouvant plus payer son modeste loyer, se retrouve seule dans la rue. Plutôt que de se replier sur elle-même, elle discute dans les rues, dans les cafés non pas pour draguer mais avant tout pour communiquer, partager. De ses différentes rencontres, Sue veut capter un amour d'un soir, un journaliste, une étudiante. D'aucunes de ces personnes ne sauront la véritable détresse qu'elle endure. Se jouant des apparences, la jeune femme s'exprime de manière polie, attentionnée envers l'autre, à l'écoute, toujours affable; dégage par ses tenues élégantes, un physique soignée..
Mais la lente descente aux enfers exécute son odieuse mécanique, Sue dépouillée de toute vie sociale, matérielle, affective, élit domicile dans un jardin public. De l'argent qu'il lui reste, elle se nourrit comme elle le peut et désire, à tout prix, sauver les apparences pour ne pas déranger; pour ne pas mettre en évidence ce mal qui va doucement la ronger : l'exclusion ! lorsqu'elle se retrouve dans l'impossibilité de s'offrir un simple café, la jeune femme se dirige de nouveau vers ce square, dernier rempart de son isolation. Sue n'est qu'un visage inconnu parmi tant d'autres ! c'est l'hiver : le manteau hivernal habille l'imposante cité, et sue, le regard blême, sombre dans la solitude la plus extrême, dans l'anonymat d'un Manhattan indifférent. Seule, sur le banc givré de froid, elle ne semble pas se douter que la fin est proche (elle souffre d'hypothermie), et pourtant la mort arrive à petits pas; l'assise de fer gelée, dernière couche de cette douce âme marginalisée, non pas par choix !
le portrait défaitiste de cette belle femme qu'une grande ville individualiste aura broyé de son insensibilité, Amos Kollek en évite le pathos pour mieux démontrer l'horreur passive d'une société qui ne prend plus le temps de tendre la main à l'autre. Des "fantômes" jonchent de plus en plus nos rues, des figures sans noms, qui appellent au secours de par leur détresse mais que nous feignons de pas regarder, de peur - un jour - de devenir l'un d'entre d'eux. Anna Thomson restera l'une de ces expressions les plus vibrantes et les plus parlante de cette solitude : touchante et proche en rappel de mon (et de notre) propre désert !!!!
"Ne me demandez jamais si j'aime..."