"BERNARDO BERTOLUCCI : L'AMOUREUX DES MOTS" !!!!
Lorsque l'on prononce le nom de Bernardo Bertolucci, deux films viennent de suite à l'esprit "Le Dernier Empereur" et le sulfureux " Le Dernier Tango à Paris" pour la cinéphile que je suis, le premier étant une impressionnante exécution historique, le deuxième restant - à mes yeux - le chef-d'oeuvre du réalisateur italien; mais pour mon co-blogueur 007bond, un souvenir unique et très important : c'est grâce à l'intervention d'un de ses premiers professeurs de cinéma Jean-Pierre Castagna, président de la cinémathèque de Digne les Bains, que 007bond - alors lycéen en 2009 - a eu l'immense honneur et privilège de rencontrer le cinéaste italien; d'être jugé - et noté - par ce dernier (entre autre) pour un court-métrage qu'il avait réalisé en vue de son BAC, l'encourageant avec égard dans ses futures longues études de cinéma.
Bernardo Bertolucci fait partie de ces cinéastes que l'on qualifie à la fois de poète engagé, dénonciateur et mystique. Il m'aura fallu un peu de temps pour apprécier son lyrisme, et c'est "Le Dernier Tango à Paris" né d'un fantasme - le cinéaste a rêvé une nuit qu'il rencontrait une femme dans la rue et avait des rapports sexuels avec elle sans connaître son nom - qui m'a réellement donné l'envie de découvrir ses autres longs-métrages. Bertolucci a souvent jouer avec l'ambiguité des rapports sexuels, la politique, les liens complexes amoureux dont certains critiques diront que sa réalisation (et sa mise en scène), je les cite : "un certain gongorisme (baroque) dans sa sophistication visuelle et son style chorégraphié." et ces deux derniers se retrouvent dans "Le Dernier Empereur" entre autre. Né en 1941 en Italie d'une famille d'intellectuelle, le jeune Bertolucci commence l'écriture à 15 ans et reçoit une première caméra avec laquelle il tournera ses deux premiers courts-métrages. C'est pendant ses études littéraires qu'il rencontre le directeur Pier Paolo Pasolini qu'il assiste, dès lors il se lance dans la réalisation. A la fois cinéaste et scénariste, il travaillera aux côtés de Sergio Léone pour le mythique "Il était une fois dans l'ouest". son entreprise littérale va, de plus, refléter une vision épique et romanesque de l'histoire italienne "1900" avec De Niro et Depardieu ou "Le conformiste" avec Trintignant. Mais une polémique va a tout jamais marqué la carrière de Bernardo Bertolucci venant de son troublant "Le Dernier Tango à Paris" que je développerai dans ma critique. Plusieurs fois primé, "Le Dernier Empereur" (tourné dans sa majeure partie dans la ville interdite de Pékin) consacrera la carrière filmographique du cinéaste italien, en récoltant 9 oscars dont celui du Meilleur Film et du Meilleur réalisateur.
J'avoue ne pas avoir aimé tout le cinéma de Bertolucci, peut-être trop jeune à une certaine période pour en comprendre toute la teneur, comme je l'ai mentionné plus haut. Depuis, j'ai revu ses exécutions majeures et j'ai redécouvert un cinéaste qui aime jouer avec les mots : un littéraire qui au travers de sa caméra distille (et mélange) habilement le tragique, le pessimisme, l'érotisme, le spirituel ainsi que ses idées politiques affirmées; n'oubliant pas, au passage, que ce dernier est à l'origine du renouveau du cinéma d'auteur italien avec le très acclamé et réussi " Prima Della Rivoluzione" !!!! (Wiki, Bernardo Bertolucci Etudes cinématographiques, Bertolucci par Bertolucci)
"Voir des films, c'est vraiment la chose la plus stimulante pour en faire."
LE MEILLEUR DE BERTOLUCCI (REALISATEUR, SCENARISTE)
LE MEILLEUR DE BERTOLUCCI (SCENARISTE)
"Le Dernier Tango à Paris" a été réalisé par Bernardo Bertolucci en 1971. Sortie en salle le 15 décembre 1977.
Interdit aux moins de 16 ans
Paul, un Américain établi à Paris, et Jeanne font connaissance alors qu'ils visitent, un matin d'hiver, un grand appartement vide. Ils font l'amour sans rien savoir l'un de l'autre, pas même leurs prénoms. Paul loue l'appartement et le couple s'y donne rendez-vous jusqu'à ce que la situation devienne insoutenable.
Comme je l'ai écrit, ultérieurement, il y a deux acteurs qui symbolisent - par leur interprétation unique et doucement (voire très) barrée - le cinéma que j'affectionne le plus : Marlon Brando THE MASTER et Christian Bale. Si le deuxième (étant de ma génération) est plus facilement critiquable - du moins j'essaye - de par certains de ses choix cinématographiques, le premier demeure celui qui m'a amené à cette passion dévorante pour le 7ème Art, et j'ai toujours beaucoup de mal à accepter que l'on trouve à redire sur ses interprétations majeures. Alors, oui la carrière de ce génie n'est pas exempt de quelques beaux nanars mais il reste, à jamais, celui que l'on associe à la fameuse "Méthode" de l'Actor Studio dont il se détachera rapidement (un rebelle de plus ^^) pour développer une interprétation différente : s'éloigner du scénario originel, permettant l'improvisation pour se rapprocher au plus près du personnage, et son puissant et dévorant jeu dans "Le Dernier Tango à Paris" en est l'un des plus parlants et frappants exemples.
On aura tout dit et tout entendu sur ce film qui déclenchera en 1972 l'une des plus belles polémiques cinématographiques. Passant de l'expression "de l'art et du produit laitier" à une honteuse réalisation pornographie, fustigeant au passage Bertolucci et Brando; puis si l'on s'en tient à un certain nombre de critiques de cinéphiles (plus que de vrais professionnels en la matière) pour la plupart, n'ont retenu que la scandaleuse scène du "beurre" qualifiant ce Dernier Tango de gâchis pelliculaire. D'ailleurs, le long-métrage sera classé comme film X à sa sortie, déchaînant (en plus de l'avis du public) la colère d'Associations Familiales et de certains journalistes; interdit de projection en Italie, pays du célèbre cinéaste, qui pour la petite histoire, sera déchu de ses droits civiques ! Que reste-t-il en 2014 de cette controverse cinématographique ? un long-métrage puissant, aux fiévreux accents érotiques où le géant Brando vampirise de son intensité morbide la caméra de Bertolucci !
Qui n'a pas fantasmé de rencontrer, au hasard d'une rue, d'un appartement vide, un parfait - en l'occurrence ici - une parfaite inconnue et de s'abandonner aux plaisirs de la chair sans en connaître sa véritable identité ? Nous l'avons tous(tes) certainement songé, espéré sans oser se l'avouer. De ce Dernier Tango, deux corps convulsés, deux âmes masochistes et destructrices vont aller jusqu'au bout de cette passion où l'amour ne trouvera jamais sa place. Mais ce chef-d'oeuvre absolu est surtout une "ôde" dramatique à l'incommunicabilité (comme le soulignera justement des critiques) entre deux êtres où l'érotisme puis l'innocence de Maria Schneider/Jeanne se mêle aux souffrances macabres de Brando/Paul.
Si beaucoup ont perçu (encore aujourd'hui) un énième film salace à la frontière de la pornographie, il n'en est rien. Bertolucci suggère plus qu'il ne montre et c'est bien en cela que son exécution demeure unique. La danse, l'acte sexuel, la violence, le sinistre exécutent leurs derniers pas de tango pour un couple, qui au final, n'en sera jamais un, le cinéaste italien les filmant rarement enlacés l'un contre l'autre. De ce lyrisme érotico-tragique, Bertolucci amène à des réflexions sur le couple tel que ce désir (toujours) récurrent de notre chère société à vouloir nous formater (nous conforter) dans ses sempiternels diktats (le mariage, les bonnes moeurs....) ! le dernier tango de Brando/Schneider tentera, en vain, de les balayer. Et une fois passé les premières scènes surfant sur un léger parfum de scandale, le réalisateur amène deux destins : Paul , sa souffrance et son incompréhension face au suicide de sa femme et Jeanne dont le fiancé (Jean-Pierre Léaud) va filmer le portrait d'une jeune fille de bonne famille.
Plus qu'une simple oeuvre cinématographique "Le Dernier Tango à Paris" est un tableau, une peinture désespérée portée par la musique de Gato Barbieri ! de cette fulgurante envie de croire à l'impossible, l'amour à deux, Bernardo Bertolucci délivre une passion brûlante, funeste, poétiquement bestiale, comme l'interprétation d'un sublime, magistrale Marlon Brando surnommé - à juste titre - "la beauté animale" que le cinéaste italien saura capter, magnifier pour la dernière fois en 1972, dans son ultime pas de deux à Paris : Beau à en pleurer !!!!
ON THE SET
PEINTURES DE FRANCIS BACON - PEINTRE DE LA CRUAUTE, LA VIOLENCE ET LA TRAGEDIE - QUI INSPIRERONT BERTOLUCCI ET BRANDO POUR LE PERSONNAGE DE PAUL (Le Dernier Tango à Paris).
"Je filme comme on plonge dans le chaos intime le plus absolu."